Le transféminisme
Aujourd'hui nous avons souhaité donner la parole à notre amie Lexie sur les questions de genre et de féminisme.
Lexie est chercheuse et militante pour les droit trans, autrice de "Une Histoire de Genres" et contributrice a Moi Aussi.
Autour des mots qui nous servent à organiser le féminisme, on semble assister à un éclatement lexical. Une constellation de termes sont aujourd’hui plus accessibles aux espaces mainstream : afroféminisme, écoféminisme, féminisme anti-carcéral… ou encore transféminisme. Ces mots, et les organisations, les théories dont ils sont la façade sont en fait loin d’être récents, et si on a récemment assisté à des crispations quant à leur utilisation, accusés de diviser, de faire perdre le but du mouvement ; ces mots sont précieux.
Loin de soustraire au féminisme des opportunités de parole et d’action, ils ajoutent des paroles rendues spécifiquement visibles et nous permettent aussi une autocritique saine pour l’inclusion et la construction d’un féminisme des différences. Notre peur de la communauté, de la marge et des autres, très française, rend en fait nécessaire la communauté pour construire une survie des minorités. Et elle permet plus encore, la floraison de cultures militantes, de cultures de luttes. Ces termes sont les étendards de nos fiertés et de la dignité que nous voulons construire ; de l’égalité que nous voulons atteindre par nos féminismes. Et le mouvement féministe de la majorité doit y voir les nuances d’une sororité réaliste.
Pour moi, c’est le transféminisme qui sert de refuge. Et ce mouvement il remonte ! Ses théoriciennes, d’abord américaines, publient et travaillent dans les cercles académiques des années 1980 à construire une théorie pour un féminisme des femmes trans, et au sein d’une sororité globale. Il s’agit fondamentalement de réfléchir les spécificité sociologique des parcours de femmes trans : quels obstacles à leur émancipation, quelles violences du patriarcat, mais aussi des femmes cisgenres, quels besoins (notamment dans les transitions).
De fait, encore aujourd’hui le transféminisme apparaît comme « un autre sujet » ; et s’il est évident que certains dynamiques ne concernent que nous, la convergence est évidente et même chiffrable… souvent au désavantage des femmes trans notamment sur les questions d’écart salarial ou d’accès à l’embauche. Pour d’autres sujets qui forment la racine de nos combats, les statistiques sont comparables ; c’est le cas sur les violences domestiques et conjugales et le non dépôt de plaintes.
L’omniprésent débat à savoir si oui ou non nous sommes des femmes est devenu une arme pour le patriarcat qui érige les femmes trans comme adversaires au féminisme. Cette non-question est devenue un instrument pour nous empêcher de nommer cette convergence objective et nous permettre de faire front commun. Un front plus solide, plus fort. Les femmes trans sont différentes des femmes cisgenres. Les femmes noires sont différentes des femmes blanches. Mais il ne doit plus être question de limiter la légitimité des identités de femmes minorisées dans le féminisme ; en reproduisant la violence du patriarcat qui exige toujours plus stéréotypique de nous, nous faisons son jeu.
Texte rédigé par Lexie, @aggressively_trans
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